Puisque cette fin d'année s'annonce être un tourbillon de scènes (boulimie pour compenser peut-être le scepticisme que m'inspirent les prochaines semaines que je sens compliquées), autant rendre hommage à celle qui a fourni un bon échauffement avant que d'autres mondanités en effacent le souvenir.
Quelques mots donc sur Agnes Obel, qui clôturait le concert des Inrocks du 2 novembre dernier au Casino de Paris.
Une expérience à plus d'un titre : nouvelle artiste, nouvelle salle.
Si je me suis jetée comme une enragée sur les billets lorsqu'ils ont été mis en vente il y a cinq mois, c'était surtout par frustration de n'avoir pas pu aller voir cette chanteuse-pianiste aux Bouffes du Nord à l'hiver dernier. En effet, je n'avais pas la moindre idée de qui était Agnes Obel jusqu'à ce qu'elle soit la star du Live du Figaro... Quand j'ai cliqué sur ces vidéos pour m'offrir une jolie bande-son à ma permanence filaire, je ne m'attendais pas à être ravie par ce piano et cette voix mélancoliques à souhait. Dont les notes coulent comme de l'eau froide sur les pierres d'une grise journée d'hiver (ce qui fait que le titre le plus connu Riverside est très aptement nommé) sans pour autant briser le coeur comme les chansons d'Adele que j'adore mais qui donne très envie d'aller se défenestrer au plus vite tellement l'émotion est bouillante et douloureuse.
Charmée par cette rencontre initiale (avec Agnes Obel, fin de l'aparté adelesque), j'ai accouru sur Deezer pour écouter l'album de cette délicate Danoise qui a vécu à Berlin. Arrivée au but, j'ai été un peu décontenancée... des chansons cristallines avec une orchestration minimales : piano, un peu de cordes. Un accompagnement minimaliste et quelques parenthèses instrumentales, parfait écrin d'une maestria sur les touches et d'une voix maîtrisée. Tout ne m'a pas convaincue mais j'ai été soufflées par Riverside, Avenue, On powdered ground, close wath et wallflower. Par contre Just so, popularisée par une pub de voiture, m'a agacée.
Toute cette simplicité suggérait un énorme potentiel pour un agréable concert en acoustique, d'où ma détermination à aller tenter l'expérience au plus vite. Quand la possibilité Inrocks s'est présentée, j'ai donc surmonté sans trop mes réticences que constituait la litanie d'artistes invités dans laquelle Agnes Obel était perdue. Car avant de pouvoir s'en délecter les oreilles, il allait falloir affronter Baltazar, Other lives et Florent Marchet, soit une soirée marathon de quatre heures.
Pour passer le temps fut décider avec ma coéquipière du jour de passer en bons Parisiens le 1e acte au zinc du Casino de Paris... L'acoustique de Balatazar était excellente et les mélopées pas désagréables donc rassurées on s'est dit qu'on allait rejoindre nos places pour Other lives, où ce fut la grosse déception. Dommage d'avoir autant de musiciens et d'instruments sur scène pour livrer une grosse soupe où les plages de synthétiseur cannibalisent tout le reste. Heureusement, chaque artiste étant alloué 45 minutes de gloire, l'ennui fut de courte durée. Et vite oublié face à l'enthousiasme débordant de Florent Marchet. Que je ne connais absolument pas mais qui apparemment est en train de se faire un nom. Ses paroles sont distrayantes, même si la musique n'est pas du toute ma tasse de thé et que le coté clone de Mika de Florent Marchet m'a beaucoup distrait. Ceci dit, après le mutisme d'Other lives, la bonne humeur du jeune homme qui interagissait énormément avec la salle était communicative et qu'en prime il nous a même fait un duo avec Gaétan Roussel. Le souci de toutes ses blagues avec le public fut le dépassement horaire -1h10- qui a d'autant raccourci la prestation d'Agnes Obel.
Celle-ci est montée sur scène avec deux gages de qualité : un violoncelle et une harpe (inattendue). Et il a suffi que le noir se fasse dans la salle pour que l'ambiance rock des heures précédentes cède la place au recueillement que l'on trouve dans les concerts de musique classique. L'acoustique était fantastique : le piano translucide, le violoncelle vibrant et la harpe égrenant inquietamment sa note. Pour preuve, même mes vidéos basse résolution ne sont pas détestables !
Pour nous mettre en appétit un instrumental et Beast que j'ai écouté avec une oreille attentive et nouvelle. Quelques mots d'introduction un peu timide, encore plus embarrassés quand pour la première fois un spectateur un peu lourd a hurlé à la cantonade "Riverside", occurrence qui se répétera. De mon côté je ne tenais qu'à deux morceaux en particulier : Riverside et Avenue. Le reste m'importait peu tant la maestria d'Agnes Obel au piano était hypnotique et reposant. De la beauté et du vide dans la tête pour une longue ballade intérieur le long des sentiers de la mémoires et des émotions rugueuses, un monde où les mots importent peu finalement. Je ne pourrai donc pas commenter avec précisionet odre la setlist intégrale mais pour une fois je ne prétendrai pas à l'exhaustivité : Over the hill, smoke and mirrors (qu'il me faut redécouvrir d'urgence), close watch, riverside... mais le clou et la révélation du soir fut étonnamment On powdered ground.
La chanson est celle qui a le plus bénéficiée des improvisations concert : rallongée de trois minutes avec une époustoufflante course finale entre le paino, le violoncelle et la harpe en arbitre. Au début de sa tournée, Agnes Obel n'était qu'en duo avec sa violoncelle mais la harpe est une addition qui donne au titre une atmosphère encore plus mystique et crépusculaire. Un délice qui prend à la gorge et fait vibrer douloureusement au chuintement si humain de l'archet.
La fin de ce moment de bravoure fut d'autant plus abrupte qu'AgnesAgnes obel réapparaît et entame une version accélérée de Just so qu'elle n'aura même pas le temps d'achever, l'interrompant littéralement au milieu d'un couplet toute désolée.
Malgré cette conclusion à la hussarde et le peu de temps de scène dont Agnes Obel disposait après les fantaisies de M. Marchet, je suis ressortie de cette soirée épique ravie tant la qualité était au rendez-vous. En espérant que si prochaine fois il y a, elle soit définitivement plus longue et sans prologue rock.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire