Si la vanité et la luxure sont un péché, alors j'ai fauté! Pendant des mois, l'affiche placée sur le kiosque au croisement de l'institut du Monde Arabe et de Jussieu n'a céssé de me faire des propositions indécentes. Un serpent tentateur qui tient en neuf mots La dernière nuit pour Marie Stuart avec Isabelle Adjani. Le chien pavlovien qui sommeille en moi s'est aussitôt mis à saliver...
Quoi la sublîme interprète de la Reine Margot (pour tous ceux qui en doutent ou qui ne tombent pas sous le charme de -l'anatomie, ahem- de Vincent Perez, le visionnage de la scène du mariage est impératif ou comment le oui est arraché des lèvres de Marguerite de Valois par le poing décidé de Charles IX. Pour mémoire, j'avais même désobéi à la loi, âgée de 11 ans, j'avais déclaré la main sur le coeur en avoir 12, c'était l'époque où on me donnait encore le bon dieu sans confession!) allait préter son visage à la mythique reine d'Ecosse (et de France et d'Angleterre ce qui causa sa perte), épouse éphémère du non moins bref roi de France, François II (et donc belle-soeur de Margot vous suivez ?^^), meurtrière de son deuxième mari, amazone inconsciente et pourtant mère du future roi d'Angleterre, mais qui à force de complôts maladroits et caballes fut décapitée sur ordre de sa cousine Elizabeth I et où le bourreau maladroit s'y repris à trois fois (eeerk) ? Autrememnt deux de mes passions là encore en un même lieu !
Toute l'année j'ai résisté vaillement, pretextant le prix des places ou la qualité incertaine de la pièce composée par un auteur méconnu alors que sur le même sujet Schiller, lui-même, avait écrit! Et puis lorsque vinrent les feux de la rentrée théâtrale, une succession de couvertures glamour par les démoniaques Figaro Magazine et Paris Match eut raison de ma lucidité et je craquai. Pourtant l'absence de générales pour les critiques et le titre laconique d'une dépèche AFP, inhabituellement cassante ("Adjani triomphe dans Marie Stuart malgré un texte faible") auraient dû m'alerter mais qu'importe quand on adore, on devient fou!
Arrivée au Marigny, nous sommes accueillies comme des princesses avec programme soigné et rempli de publicités qui nous laisse entreapercevoir des costumes enchanteurs tandis qu'en face de nous se dresse la scène, un imposant mur-prison-citadelle tout en rouge sang.
L'instant où Isabelle apparaît le public laisse passer un souffle puis l'applaudit avant de retomber dans la surprise de son apparence. Campant une reine emprisonnée au crépuscule de sa vie, elle est méconaissable : petite vieille vétue d'une chemise d'aliénée, la figure arrondie, le cheveu sale...
Comme je le craignais, la prose de l'Allemand Wolgang Hildesheimer est insignifiante et soporifique, trop dans l'introspection. Où est le drame, la tension, le dilemne, la tragédie ? sûrement pas dans les personnages secondaires complètement bâclés à l'exception du préparateur et de l'assistant du bourreau (un ex du Stade Français) qui étant muet n'a aucune ligne inutile à délivrer ce dont le spectateur lui est reconnnaissant.
Heureusement il y a la reine Isabelle qui choisit avec brio le registre de la suppliciée ayant rendu son âme à la flamme de la folie : de la rédaction d'un testament sans cesse interrompu à la procession mortuaire de ces chiens empaillés dans leurs cercueils au fond bien plus fidèles et aimant que ses serviteurs... Souvent poignante qu'on passe outre les faiblesses du reste. Comment ne pas voir Isabelle plutôt que Marie lorsqu'Adjani lance à la foule/public venu admirer son exécution : "tout le monde a ici une idée préconçue de moi, ils croient savoir qui je suis et ils se trompent", "Ne me regardez pas. Mon corps, mon visage. Je ne me reconnais plus." ou "les rumeurs m'ont tuée."... dans ce moment les cordes de notre émotion frémissent. A d'autres moments sa voix de braise sans larme frappe par sa monotonie et on aurait apprécié moins de retenue, d'appels à Dieu et à la raison.
La garde est baissée seulement dans les dernières répliques lors de la préparation mortuaire, qui voit le lynchage du pharmacien pour cause de confession non catholique, les adieux de Marie, qui au moment de poser sa tête sur le billot dans sa robe blanche d'où on enlève la fraise fait le saut de l'ange avant que le rideau-hâche ne tombe sous un tonnerre d'applaudissements.
Oui je vous assure, c'est bien Isabelle Adjani la dame blanche et floue au centre de mon objectif hiératique!
Quoi la sublîme interprète de la Reine Margot (pour tous ceux qui en doutent ou qui ne tombent pas sous le charme de -l'anatomie, ahem- de Vincent Perez, le visionnage de la scène du mariage est impératif ou comment le oui est arraché des lèvres de Marguerite de Valois par le poing décidé de Charles IX. Pour mémoire, j'avais même désobéi à la loi, âgée de 11 ans, j'avais déclaré la main sur le coeur en avoir 12, c'était l'époque où on me donnait encore le bon dieu sans confession!) allait préter son visage à la mythique reine d'Ecosse (et de France et d'Angleterre ce qui causa sa perte), épouse éphémère du non moins bref roi de France, François II (et donc belle-soeur de Margot vous suivez ?^^), meurtrière de son deuxième mari, amazone inconsciente et pourtant mère du future roi d'Angleterre, mais qui à force de complôts maladroits et caballes fut décapitée sur ordre de sa cousine Elizabeth I et où le bourreau maladroit s'y repris à trois fois (eeerk) ? Autrememnt deux de mes passions là encore en un même lieu !
Toute l'année j'ai résisté vaillement, pretextant le prix des places ou la qualité incertaine de la pièce composée par un auteur méconnu alors que sur le même sujet Schiller, lui-même, avait écrit! Et puis lorsque vinrent les feux de la rentrée théâtrale, une succession de couvertures glamour par les démoniaques Figaro Magazine et Paris Match eut raison de ma lucidité et je craquai. Pourtant l'absence de générales pour les critiques et le titre laconique d'une dépèche AFP, inhabituellement cassante ("Adjani triomphe dans Marie Stuart malgré un texte faible") auraient dû m'alerter mais qu'importe quand on adore, on devient fou!
Arrivée au Marigny, nous sommes accueillies comme des princesses avec programme soigné et rempli de publicités qui nous laisse entreapercevoir des costumes enchanteurs tandis qu'en face de nous se dresse la scène, un imposant mur-prison-citadelle tout en rouge sang.
L'instant où Isabelle apparaît le public laisse passer un souffle puis l'applaudit avant de retomber dans la surprise de son apparence. Campant une reine emprisonnée au crépuscule de sa vie, elle est méconaissable : petite vieille vétue d'une chemise d'aliénée, la figure arrondie, le cheveu sale...
Comme je le craignais, la prose de l'Allemand Wolgang Hildesheimer est insignifiante et soporifique, trop dans l'introspection. Où est le drame, la tension, le dilemne, la tragédie ? sûrement pas dans les personnages secondaires complètement bâclés à l'exception du préparateur et de l'assistant du bourreau (un ex du Stade Français) qui étant muet n'a aucune ligne inutile à délivrer ce dont le spectateur lui est reconnnaissant.
Heureusement il y a la reine Isabelle qui choisit avec brio le registre de la suppliciée ayant rendu son âme à la flamme de la folie : de la rédaction d'un testament sans cesse interrompu à la procession mortuaire de ces chiens empaillés dans leurs cercueils au fond bien plus fidèles et aimant que ses serviteurs... Souvent poignante qu'on passe outre les faiblesses du reste. Comment ne pas voir Isabelle plutôt que Marie lorsqu'Adjani lance à la foule/public venu admirer son exécution : "tout le monde a ici une idée préconçue de moi, ils croient savoir qui je suis et ils se trompent", "Ne me regardez pas. Mon corps, mon visage. Je ne me reconnais plus." ou "les rumeurs m'ont tuée."... dans ce moment les cordes de notre émotion frémissent. A d'autres moments sa voix de braise sans larme frappe par sa monotonie et on aurait apprécié moins de retenue, d'appels à Dieu et à la raison.
La garde est baissée seulement dans les dernières répliques lors de la préparation mortuaire, qui voit le lynchage du pharmacien pour cause de confession non catholique, les adieux de Marie, qui au moment de poser sa tête sur le billot dans sa robe blanche d'où on enlève la fraise fait le saut de l'ange avant que le rideau-hâche ne tombe sous un tonnerre d'applaudissements.
Oui je vous assure, c'est bien Isabelle Adjani la dame blanche et floue au centre de mon objectif hiératique!
Car au fond, nous ne sommes venues que pour elle, et c'est tout à son honneur d'insuffler passion et talent dans un texte invisible et d'arriver à nous faire trembler. Très vite les camarades d'Adjani lui abandonnent la scène pour un long salut-communion avec les spectateurs.
Et même si je suis un peu déçue, je ne regrette point mon moment d'égarement: Isabelle, si tu joues Phèdre, Andromaque ou Médée je serai là ^________^
Et même si je suis un peu déçue, je ne regrette point mon moment d'égarement: Isabelle, si tu joues Phèdre, Andromaque ou Médée je serai là ^________^